Le mardi 18 octobre 2022, l’auditorium du Monde accueillait la deuxième édition du Good Forum centré sur la technologie et ses impacts sur l’environnement & la société. La richesse de cette conférence tient dans la diversité de ses intervenants allant du jeune créateur de startup innovante, au chargé de développement durable chez l’Oréal ou bien même par le militant de la « décroissance prospère ». Voici notamment quelques questionnements qui rassemblent tous ces acteurs : comment rendre notre société plus responsable ? Serait-ce par la green innovation dans le digital ? Ou par une mutation profonde de notre utilisation des outils ?
Dans un premier temps, nous pouvons noter une notion essentielle autour du changement que nous vivons : la nécessité de synergie des différents acteurs. Il est vrai que les avancées en matière de transition écologique sont souvent le fruit de réflexions collectives. Moët&Hennessy, par le biais de sa directrice développement durable Sandrine Sommer, ouvre ces problématiques au sein même de ses marchés. Dans une optique d’open innovation, la filiale du groupe LVMH voit ainsi ses concurrents se muer en partenaires de réflexion. C’est aussi le cas pour le groupe Cointreau, aujourd’hui acteur du projet Living Soils Living Together, qui lutte aux côtés de Moët&Hennessy pour la préservation des sols. Cette mutation du spectre concurrentiel est rendue possible grâce au digital.
« Pas d’action pertinente sans analyse pertinente » Sasha Morard
Facilitateur de contact, le digital permet également la mise en place d’outils de mesure et d’indicateurs précis. Comme le dit Sasha Morard, CIO du groupe Le Monde, pas d’actions pertinentes sans analyses pertinentes. Le point commun entre la web performance du site Le Monde et le quotient d’irrigation d’un vignoble champenois ? Les statistiques. Cette nécessité d’analyser pour faire évoluer les performances prend une tout autre dimension avec le digital. Il nous offre la possibilité d’identifier, traiter et regrouper une quantité quasi illimitée d’informations qui sont nécessaires à l’optimisation des business models pour les rendre plus responsables.
Le Cloud quant à lui, permet de mettre en commun ces informations quasiment instantanément et sans limite géographique. Vous souhaitez partager l’analyse statistique de votre empreinte carbone avec une entreprise basée en Norvège, il vous suffit d’un clic. Mais ce clic est-il sans conséquence ? Le cloud nécessite des data centers dont 40 % de l’énergie consommée sert à expulser leur propre chaleur. Chaque année, ils évacuent l’équivalent énergétique de 40 milliards de douches chaudes. Le contrecoup environnemental du digital, bien que discret, a un réel impact. C’est là que l’innovation et les green tech entrent en jeu. Jonathan Klein, à la tête de la startup Tresorio, conceptualise par exemple un data center capable de renvoyer la chaleur des datacenters dans les conduits de chauffage d’un bâtiment. Cet exemple nous ramène aux fondamentaux du progrès technologique : la réponse à un besoin.
« Remettre le besoin au centre de l’innovation » Mélanie Tisserand Berger
On parle ici de la raison d’être de l’innovation. C’est l’idée que défend Mélanie Tisserand Berger, dirigeante et fondatrice d’EMS Audit, cabinet d’expertise-comptable indépendant et présidente du CJD France. Selon elle, il est nécessaire de remettre le besoin au centre de l’innovation. C’est d’ailleurs dans cette dynamique qu’Henri d’Agrain, Délégué Général du CIGREF, a ouvert ce Good Forum : « Depuis les années 80, nous avons remplacé la notion de progrès qui traduit une recherche du mieux-être par la notion d’innovation traduisant le mieux avoir ». Aujourd’hui plus que jamais, l’innovation doit optimiser notre réponse à des besoins existants, pas en créer de nouveaux.
« Il faut troquer notre techno béatitude par un techno discernement » Nadia Boeglin
Cette prise de conscience ne réside pas seulement dans la création. La technologie est avant tout ce que l’on en fait. Selon Nadia Boeglin, directrice transition écologique grand compte ADEME, l’impact énergétique des technologies est dû à 50 % à la technologie elle-même et à 50 % à son utilisateur. Appareil en veille, sur-mailing, stockage démesuré de données, site mal optimisé, tant de mauvaises utilisations du digital qui, in fine, ont un impact considérable sur les besoins en énergie. Il est maintenant nécessaire de sensibiliser les collaborateurs comme les particuliers sur la bonne manière de consommer. D’après Anne Imbert, VP Brand, Advertising & Content chez Orange, les marques ont ici un vrai rôle à jouer. Ces grandes marques doivent aujourd’hui rendre le sustainable plus « sexy ». La sobriété et le « responsable » sont encore vus comme des notions privatives et culpabilisantes alors qu’elles ne sont synonymes que d’adaptabilité.
C’est ainsi que la transition écologique nécessite une évolution du comportement menant à la création d’une cohérence entre comportement et outil. On parle ici du fameux cercle vertueux de la croissance verte ; des greens tech faisant écho à une utilisation responsable. Si la question était initialement de savoir si le digital peut à lui seul mener à cet idéal, la réponse est définitivement non. Il est évident que les enjeux environnementaux auxquels nous faisons face nécessitent un réel changement tant dans nos habitudes de consommation que d’utilisation de nos technologies. Le digital n’en est pas moins un outil formidable qui peut être un socle solide, porteur de cette transition.
Le petit mot de la fin sur Good Forum 2022
J’ai particulièrement apprécié la table ronde Tech&communication durant laquelle a été abordé entre autres le sujet du bilan carbone individuel. Rapidement, l’idée est bonne, mais dans un simple objectif de comparaison entre différents individus. En effet, comme l’explique Dan-Antoine Blanc-Shapira, notre système, notre économie, les produits que nous consommons, ne fonctionnent pas sur un modèle éco-responsable. Autrement dit, ces 2 tonnes de CO2 par personne qui apparaissent comme un « objectif à atteindre » ne sont en réalité pas adapté à notre société.
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