L’avenir du lieu de travail : quelles tendances et innovations pour 2024 ?
Avec l’adoption généralisée du flex office, l’évolution de la gestion des espaces de travail, et l’essor du télétravail, le monde du travail a connu une transformation majeure ces dernières années. Pourtant, une question demeure souvent négligée : Quelle est la nouvelle identité de ces organisations à la suite de ces changements et quelles sont les conséquences de l’absence de réflexion à ce sujet ? Comment peut-on créer un lieu de travail qui donne envie de se retrouver, d’avoir des vraies discussions face à face et de se lancer ensemble dans les aventures et les projets d’innovation qui vont changer le monde ?
Salle de créativité à la Station F réalisée par Good Morning Creativity
Crédit photo : Roberto Frankenverg, New York Times
Le lieu de travail a beaucoup évolué ces dernières années, notamment suite à la pandémie de Covid-19. Certaines entreprises ont accéléré leur passage au flex office, les solutions de gestion des bureaux ont pris de l’ampleur, et la majorité des organisations proposent 2 jours de télétravail par semaine, voire parfois du 100 % télétravail en abandonnant leurs bureaux fixes.
Néanmoins, quelques questions restent peu ou mal adressées : quelle est la nouvelle identité de l’organisation suite à tous ces changements ? Et comment l’absence de ce questionnement impacte la performance de cette organisation ? Avons-nous vraiment besoin des bureaux pour travailler, pour apprendre, pour avancer ou pour innover ? Si oui, quels aménagements, quelle organisation, quelle culture, quels impacts sur le futur de l’entreprise ?
Je répondrai à ces vastes questions dans un futur article, mais dans un premier temps, je vous partage quelques tendances pour le lieu de travail en 2024.
Le lieu de travail, d’abord un lieu de vie et de co-création
L’appel au ralentissement ou “Slow Design”
Faire évoluer l’atmosphère de travail pour répondre aux enjeux de désengagement et de santé mentale des collaborateurs
Fin de la lune de miel avec le télétravail ?
Retour au bureau dans un espace repensé avec GOOD MORNING CREATIVITY
Tendance #1 : le lieu de travail, d’abord un lieu de vie et de co-création
Nos activités sont aujourd’hui plus riches et variées. Les lieux de travail doivent être aménagés d’une façon qui permet aux collaborateurs de faire plusieurs types d’activités dans une même journée. Par exemple : commencer la journée avec un tête-à-tête avec un manager, puis un atelier, un déjeuner avec plusieurs personnes, une participation à une conférence… ll s’agit d’offrir des zones à usages variés : on parle des villages d’activités qui sont adaptés aux activités et à la culture de l’entreprise.
Aujourd’hui on ne vient pas au bureau pour travailler seul dans un coin. On vient pour participer dans les projets collaboratifs, pour résoudre plus rapidement des problèmes opérationnels et pour contribuer avec nos idées et notre expertise aux projets stratégiques. Nous avons besoin d’espaces et d’outils (physiques et numériques) pour la co-création et le travail collaboratif.
Tendance #2 : l’appel au ralentissement ou “Slow Design”
Tout au long de la journée, le collaborateur reçoit une quantité énorme d’informations et d’échanges. Un espace dédié au repos, à la réflexion et propice à la déconnexion des problématiques de travail aura un impact considérable sur la productivité, le bien-être et la fidélisation des collaborateurs.
Plusieurs concepts ont vu le jour ces dernières années dans les entreprises, comme les espaces bibliothèque, les massages, ou encore des espaces de sieste…
Tendance #3 : faire évoluer l’atmosphère de travail pour répondre aux enjeux de désengagement et de santé mentale des collaborateurs
Cela vous paraît anecdotique ?
%
des employés à plein temps expriment ressentir au moins, de temps en temps, des symptômes de burn-out (quand ce n'est pas du bore-out)
Tendance #4 : fin de la lune de miel avec le télétravail ?
Elle nous avait fait sauter à pieds joints dans le travail à distance, et pourtant l’entreprise Zoom pousse aujourd’hui ses collaborateurs à revenir au bureau. La société américaine, à l’origine du logiciel de visioconférence du même nom, a en effet demandé à ses salariés de réduire leurs jours de télétravail sans pour autant le supprimer complètement.
Les salariés qui habitent à moins de 80 kilomètres d’un bureau de l’entreprise Zoom (aux États-Unis, mais pas que) doivent ainsi être présents 2 jours par semaine au minimum depuis septembre 2023. L’entreprise Zoom dit ainsi adopter une « approche hybride structurée ».
Connu sous l’acronyme RAB pour “Retour au bureau”, ce phénomène commence aussi à être visible en France.
Retour au bureau donc, mais dans un bureau parfaitement repensé, aménagé et équipé. Pour vous partager des inspirations et des solutions, nous avons interviewé Petronela ZAINUDDIN, fondatrice de GOOD MORNING CREATIVITY, un studio design spécialisé dans la création d’espaces d’innovation, de créativité et de l’apprentissage actif.
Retour au bureau dans un espace repensé avec GOOD MORNING CREATIVITY
Bonjour Petronela, quelles sont les problématiques pour lesquelles les clients vous sollicitent ?
- « La première : ils souhaitent démocratiser l’innovation, créer une véritable culture de l’innovation. Cette initiative est souvent amorcée lorsque l’entreprise déménage, ils en profitent pour aménager les lieux de travail. Le Covid a été un accélérateur pour nous, car le télétravail a poussé les entreprises à repenser leurs locaux.
Nous faisons place à l’innovation de manière physique, par l’aménagement de plusieurs espaces qui offrent un véritable terrain de jeu. Ces espaces seront dédiés à l’expérimentation, l’apprentissage, le co-design…
Ces lieux sont aussi destinés à être ouverts vers l’extérieur, car il s’agit souvent de pouvoir faire venir les partenaires ou les clients de l’entreprise pour co-créer ensemble des innovations futures.
Petronela Zainuddin
Crédit photo: Elsa Lebaratoux
- La deuxième problématique concerne davantage des centres de formation, des écoles ou des lieux d’apprentissage en général. Ces derniers souhaitent donner une dimension ludique et active à l’apprentissage. Il s’agit notamment de l’apprentissage des soft skills – l’empathie, la créativité, la prise de parole en public, la coopération, le leadership et autres.
Pour développer ces compétences, les apprenants ont besoin de pratiquer, d’observer, d’analyser, de construire quelque chose de concret pour mieux comprendre.
Nos clients souhaitent s’éloigner des formations académiques en basculant sur des ateliers, travaux, maquettes ou encore jeux de rôle. Il faut donc adapter les lieux à ces nouvelles formes d’apprentissage et les rendre inspirantes et fonctionnelles. »
« Depuis 6 ans, nous travaillons avec ACADOMIA, spécialisée dans l’éducation, pour créer leurs espaces de co-learning et aménager leur collège-lycée privé ÉCOLE A plus agréables et adaptés à l’apprentissage actif, ludique et coopératif des jeunes.
Nous sommes également intervenus sur leur siège social et leur centre de formation où ils forment leurs collaborateurs mais aussi les professeurs. Ce sont des projets qui durent vraiment plusieurs années.
Pour les construire, nous utilisons la méthodologie de Design Thinking. Nous impliquons des collaborateurs dès le début en effectuant plusieurs séances de co-design. Nous essayons d’avoir une variété de profils d’expertise et d’âge, pour identifier leurs besoins. Nous leur posons des questions telles que: Quelle est la manière dont vous voulez travailler ? Comment voyez vous l’entreprise de demain ? Quelle est la place de la collaboration, de la créativité et de l’innovation dans votre activité …
Nous leur montrons également différents visuels pour qu’ils s’inspirent de tendances futures et de projets effectués avec d’autres clients. »
Design Lab chez ACADOMIA réalisée par GOOD MORNING CREATIVITY
Crédit photo : Alain Delange
« Nous avons réaménagé tout le siège avec ses différents étages en créant un parcours et des villages d’activités. Au RDC derrière accueil, on a proposé un espace de coworking dédié aux collaborateurs des régions qui viennent ponctuellement. Les réunions avec des clients et des partenaires y sont organisées chaque jour.
Des petites cabines de réunion sont propices à des réunions en petit comité, que ce soit entre collaborateurs ou avec des partenaires extérieurs, ces univers les mettent en confiance pour travailler. Nous avons rajouté une cantine d’entreprise au sous-sol qui peut se transformer en lieu de conférence lors de réunions mensuelles avec toutes les équipes. Pour renforcer la culture de l’innovation pédagogique, nous avons créé un Design Lab pour les ateliers de design thinking, avec des tables hexagonales à roulettes, des cloisons amovibles, et beaucoup d’outils de créativité …
Puis dernière étape de notre projet : le storytelling ; une fois le lieu physique aménagé, nous racontons une histoire en habillant les murs. Dans le cas d’ACADOMIA, nous nous sommes inspirés du mur “Je t’aime” de Montmartre pour créer un mur “Apprendre Autrement” écrit dans toutes les langues du monde. L’effet est fabuleux quand les personnes de différentes cultures se réunissent dans ce lieu, ils commencent tous à chercher leur langue natale. Nous avons également mis en place un Scrabble géant dans la cafétéria… L’idée, c’est de rendre les lieux agréables tout en les rendant communicants au public. Il faut que chaque mètre carré, qu’il soit au sol ou au mur, communique. »
Mur “Apprendre Autrement” réalisé par GOOD MORNING CREATIVITY
Crédit photo : Alain Delange
« Il est important que les lieux physiques de l’entreprise reflètent ses valeurs.
Imaginons que l’une des valeurs de l’entreprise soit l’agilité et que si on visite l’entreprise, on remarque que les collaborateurs disposent des ordinateurs fixes et des téléphones fixes. Nous sommes d’accord que cela ne reflète en aucun cas la flexibilité et l’agilité des collaborateurs. Ces derniers doivent avoir tous les outils nécessaires pour les rendre nomades, agiles et flexibles. »
Quels sont les retours suite à ce projet ?
« Globalement, c’est très positif. Les collaborateurs se sentent plus impliqués, plus motivés dans ces lieux réaménagés. Leur mode de travail devient plus varié, la journée plus intéressante, les opportunités d’apprentissage plus accessibles et leur implication dans l’innovation et dans le futur de l’entreprise plus importante.
Il y a évidemment toujours des améliorations à apporter sur certaines zones. Il peut arriver que certaines zones ne soient pas utilisées comme nous l’avions imaginé. La demande du client évolue entre le début et l’après projet, les usages deviennent différents. On le voit chez Acadomia : nous avions prévu une cabine pour l’imprimante et finalement, ils l’ont changée parce que l’emplacement était trop bruyant pour les collaborateurs. Il ne faut pas avoir peur d’opérer des changements et adapter le lieu physique à la vie de l’entreprise. »
Comment mesurez-vous l’impact du projet ?
« Quand il s’agit d’un projet lié à l’innovation, c’est assez facile, car nous avons une matrice d’impact positif AVANT et APRÈS l’aménagement. Par exemple, nous demandons au client :
- le nombre de facilitateurs formés, qui peuvent ainsi mener des ateliers seuls ;
- le niveau des compétences en innovation et en créativité appliquée,
- le nombre d’ateliers (co-design, co-création, conception) organisés dans le mois ;
- le temps accordé à l’expérimentation (en individuel ou en équipe)
- le nombre de brevets déposés (s’il s’agit d’un client dans le secteur industriel) ;
- le nombre de projets pilotes qui ont émergé depuis le projet ;
- l’engagement des clients sur ces projets pilotes.
En ce qui concerne l’impact de notre projet pour la Station F (le plus grand incubateur de start-ups de Xaviel Niel) dont nous avons aménagé la salle de créativité, l’impact s’est mesuré de manière différente. La salle étant louée à des personnes extérieures, il y a donc eu un impact sur le revenu.
Il y aussi eu un impact sur la visibilité ; un article avec la photo de la salle de créativité est paru dans le New York Times. »
Conclusion sur l’avenir du lieu de travail et les tendances pour 2024
Leur aménagement va bien au-delà de la contribution au bien-être des collaborateurs ; il accroît les performances de ces derniers et impacte positivement les revenus de l’entreprise. Mais la forme, bien que nécessaire, n’est pas suffisante. De nombreux défis doivent être adressés, que ce soit sur l’engagement collaborateur, l’accompagnement du bien-être physique et mental des salariés…
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